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Concours Acier 2025 : Le palmarès

L’objectif est de donner aux candidats l’opportunité de découvrir et explorer les possibilités architecturales et techniques de l’acier en concevant un ouvrage avec ce matériau. Depuis plus de dix ans, des centaines d’étudiants ont ainsi pu présenter leurs projets devant un jury composé d’architectes, d’ingénieurs, de journalistes et de spécialistes de la construction en acier. Les lauréats du concours sont récompensés par un prix 10 000 euros, leurs projets sont publiés dans la revue MATIÈRES et dans ce livret des prix de l’architecture acier et présentés au public lors de la Steel.in en octobre à Paris.

Composition du jury

Président : Président : Simon Teyssou – Atelier du Rouget Simon Teyssou

Victor Barasoain, architecte – MOON ARCHITECTURE
Natalina Da Costa, architecte – Hérard & da Costa architectes
Maud Russo, ingénieur – SETE – Société d’Exploitation de la tour Eiffel
Najah Ayoub, ingénieur – Cabinet JAILLET-ROUBY Ingénieurs-Conseils
Jan Meyer, journaliste – Métal Flash
Alice Bialestowski, journaliste – AMC
Pierre PAULOT – Immobilière 3F
Amina Sellali – Cheffe du bureau de l’enseignement et de la recherche en architecture au ministère

 

PREMIER PRIX

La réhabilitation de l’extension de la manufacture des tabacs de Tonneins

Hugo MONROUX, Enzo GIRAMELLI, ENSAP Bordeaux

À Tonneins, petite ville marquée par la fermeture de sa manufacture des tabacs en 2002, un site industriel de 55 000 m² attend sa renaissance. Dans cette dynamique de revalorisation portée par l’EPF Nouvelle-Aquitaine et la mairie, le projet s’inscrit dans la réhabilitation de l’extension en béton des années 60 (25 000 m²), un héritage moderniste massif, rigide et difficilement divisible, mais porteur de potentiel. En réponse à l’arrivée possible d’un investisseur souhaitant y implanter un pôle de performance sportive de haut niveau, le projet propose une relecture stratégique du bâtiment par la construction hors site en acier.

La démolition de la dalle béton séparant les sheds permet l’ouverture du cœur du bâtiment, en libérant de grands volumes lumineux. Le retrait de quatre pignons dans ce bâtiment en U, vient ainsi créer des failles visuelles et urbaines mettant à distance le tissu environnant et valorisant le patrimoine adjacent.

Ces démolitions rendent nécessaire un renforcement structurel ciblé. Innovante et industrialisable, la solution proposée consiste en un chaînage métallique préfabriqué, conçu comme une caisse d’acier venant envelopper les poteaux en béton existants.

L’autre grand geste en acier concerne la réalisation de quatre murs rideaux en pignons, composés de structures en IPN et filet métallique, fermant les nouvelles ouvertures avec légèreté et transparence. Ces structures sont issues du réemploi d’un hangar désaffecté sur le site, réduisant l’empreinte carbone du projet. De même, les tôles ondulées de couverture de ce hangar sont revalorisées.

Ce projet affirme une approche de la réhabilitation industrielle guidée par l’intelligence du contexte, la frugalité et l’inventivité. L’acier y est utilisé comme matière de couture, de renforcement.

DEUXIÈME PRIX

Révéler et sauvegarder un Pailleron

Simon Paul, Héloïse Monteil, ENSA Clermont-Ferrand et Lucas Revon, Polytech Clermont-Ferrand

Le projet interroge la valeur patrimoniale des bâtiments dits « Pailleron » sur le campus des Cézeaux. Trop souvent perçus comme banals, ils sont ici appréhendés comme les témoins d’un savoir-faire industriel des années 1970. Le choix est fait de la révélation plutôt que du remplacement.

L’acier, matériau d’origine, devient moteur du projet. Une partie de sa réutilisation structurelle est pensée comme un acte architectural fort. Dans le hall mécanique, les éléments métalliques sont démontés, inventoriés puis réinjectés dans une nouvelle trame. Dans le bâtiment A, une structure neuve en acier autoportante est insérée dans le volume évidé : elle s’élève sans toucher l’existant, dans un jeu de tension, de transparence et de flottaison. L’ancien dialogue avec le nouveau, sans imitation.

Architecturalement, le projet clarifie la lecture de la trame initiale, tout en améliorant les usages. Une triple hauteur centrale transforme le cœur du bâtiment A en puit de lumière. Des circulations généreuses révèlent la structure mise à nu. Le dernier niveau vitré accueille des espaces de travail modulables et réversibles, en rupture légère avec les étages inférieurs. La faisabilité constructive repose sur des principes rationnels : une superstructure indépendante, une ossature bois isolée en laine de roche et des panneaux de façade préfabriqués en acier galvanisé.

La démarche environnementale repose sur le réemploi : 88 poteaux, 61 poutres et des escaliers sont ainsi réinjectés dans le nouveau projet. Cette approche réduit l’impact carbone, limite les déchets et valorise l’existant. Un travail paysager accompagne la transformation, requalifiant les abords en lisière végétale.

L’innovation réside dans l’équilibre entre patrimoine et usages contemporains. Le projet révèle un potentiel spatial oublié, propose une nouvelle habitabilité, sans nier l’histoire. L’acier devient langage, outil de mémoire et levier de renouveau.

TROISIÈME PRIX

CONNECTER, RÉACTIVER, HABITER Une stratégie légère et décarbonée

Ambre Degeneve, Laetitia Piacentini, ENSAP Lille

 

Dunkerque fait face à un nouveau défi : accompagner la réindustrialisation du territoire avec l’arrivée de giga factories, d’un EPR et de leurs activités connexes. Pour répondre à cet enjeu, le projet vise à construire 1 000 logements sur les sites industrialo-portuaires du Môle 1 et de l’Île Jeanty. Pour y parvenir les deux sites sont connectés au reste du territoire grâce à la prolongation de la gare existante. La stratégie urbaine consiste à implanter un parc cultivé sur le site de l’Ile Jeanty et, de manière complémentaire, intensifier l’habitat en hauteur sur le site du Môle 1.

Les programmes résidentiels, évolutifs et flexibles dans leur mixité typologique, reposent sur un socle massif, actif et productif avec une structure durable servant de base multifonctionnelle adressée sur le port. Sur ce socle, une promenade publique élevée à six mètres de hauteur relie et distribue les différents bâtiments. Des espaces communs s’insèrent dans la rigueur structurelle des logements et favorisent ainsi les échanges et le partage.

L’habitat repose sur l’assemblage de modules répétitifs construits hors-site, composés d’une structure en acier, complétée par une enveloppe isolante. Le moisage des éléments permet d’explorer des solutions innovantes en utilisant l’acier uniquement là où il est nécessaire et en le combinant à des éléments en bois. Tous les composants respectent les dimensions standards de la construction, favorisant la réversibilité et la flexibilité. Diminuer la quantité de matière et accélérer le chantier permet de réduire l’empreinte carbone de l’ensemble.

Le projet interroge la densification, la relation entre ville et port, et la place des espaces partagés dans l’habitat collectif. Il propose un modèle réplicable sur d’autres sites industrialo-portuaires, mais aussi dans des tissus urbains denses, là où le foncier rare impose une intensification verticale. Les bâtiments existants deviennent alors les socles d’une nouvelle urbanité.

MENTION COUP DE COEUR

Entre port et quartiers nord

Léo-Pol RAUD, ENSA Marseille, Institut Méditerranéen de la Ville et des Territoires (IMVT)

Le Port Autonome n’est-il pas le lieu de nouveaux horizons ? Tapis de bitume de 10km de long, hostile et inhabitable, il est « Hors-lieu » (hors-site ?) par excellence. C’est une expédition dans un maelström de bitume, de grues démentielles, de navires titanesques et de conteneurs bigarrés. Orchestration des flux du capitalisme et spectacle de la démesure. Les constructions hors-site en acier sont inévitables pour couvrir les marchandises. Les poutres treillis, tel les baleines d’un parapluie, concurrent par leurs portées ; les poteaux en I, tel leurs mats, les soutiennent. Le terminal ferry de Mourepiane, ancien terminal fruitier, s’avance sur la mer à la manière d’une presqu’île, hors du tumulte des marchandises. Seule la structure des hangars s’est maintenue dont le Hangar 23 (H23). Sa réhabilitation à l’usage des jeunes des quartiers Nord éviterait sa destruction.

Le H23 se déploie en bandes structurelles. La première, face à la mer, propose une balade vers l’horizon maritime tandis que la seconde, face aux quartiers, offre une balade vers les horizons professionnels (partie réhabilitation). Celle-ci se subdivise en quatre doubles travées accueillant différents pôles : ils sont temporaires pour faire découvrir d’autres métiers. Cette kinésie programmatique s’inspire de la course effrénée des marchandises. Le H23 s’enveloppe de parois isolantes recouvertes de zinc. Cette écriture industrielle le camoufle. Des chapiteaux éclairent la profondeur du hangar d’un bandeau d’azur et l’aèrent naturellement. Au sol, le bitume laisse sa place à du marbre : minéralité de rupture.

La tour des logements (partie nouvelle) fait la liaison entre Port et Quartiers Nord, entre Confinement et Grand Large. Le regard la traverse comme un viseur dont le point de mire est l’horizon. Son contreventement est assuré par un jeu de haubans inspiré des vieux gréements. La tour se fait mât ; les poutres, barres de flèches. Ces poutres sont le substrat structurel de la dernière travée, démontée. Les éléments hors-site sont finalement déjà sur site. L’infini horizontal de bitume se conjugue à ce nouvel infini vertical de structure, comme la rencontre forcée entre Superstudio et Brancusi.