RESTER CRÉATIF SOUS LA CONTRAINTE

Deuxième opus du cycle de conférences « Construire les territoires de demain », le sujet « Rester créatif sous la contrainte » a été débattu le 27 juin dernier à la Maison de l’architecture en Île-de-France. Au programme : comment concilier résilience et liberté architecturale.

En charge de la transition écologique et de la résilience à la Ville de Paris, Sébastien Maire donne le ton en proposant une définition précise de la résilience urbaine ou territoriale : « La capa­cité des personnes, communautés, institutions, entreprises et systèmes, au sein d’un territoire, à survivre, à s’adapter et à se développer indépendamment des chocs majeurs en réduisant les stress chroniques auxquels ils sont et pourront être confrontés. » C’est là tout l’objet de la stratégie de résilience de Paris adoptée en septembre 2019. La capitale, dont la fière devise Fluctuat nec mergitur illustre fort à propos la démarche, entend bien renforcer sa capacité à faire face aux chocs prévisibles et imprévisibles en misant sur la gouvernance participative et la coopération des territoires. « Le territoire est ainsi vu comme un métabolisme urbain, souligne Sébastien Maire. Il nous faut profiter de l’aléa pour le tourner en opportunité en intégrant chocs majeurs – incendie, inondation, séisme, terrorisme, canicule, accident industriel… – et stress chroniques – pénurie d’eau, manque de logements abordables, chômage, pauvreté, inégalités… » Paris s’appuie sur six enjeux de résilience : les inégalités sociales, économiques, territoriales et la cohésion sociale ; le risque terroriste ; le dérèglement climatique ; la pollution de l’air ; les risques liés à la Seine ; enfin, la gouvernance territoriale. L’avenir est incertain, et les solutions d’aujourd’hui ne sont pas forcément celles de demain. Pour autant, la stratégie de résilience se décline en 35 actions reposant sur trois piliers : la ville inclusive et solidaire qui s’appuie sur ses habitants, construite et aménagée pour répondre aux défis du 21e siècle, mobilisant l’intelligence collective et coopérant avec les autres territoires. « L’idée que nous défendons consiste à anticiper ces scénarios, même s’ils peuvent devenir caducs, observe Stéphane Herbin, direction de la commu­nication et de l’innovation au CTICM (Centre technique industriel de la construction métallique). En concertation avec les usagers, les maîtres d’ouvrage, les gestionnaires de territoire, les architectes et l’ensemble des concepteurs, il nous faut déterminer les pertinences adaptées à chaque matériau. » Il est en effet peu pertinent de construire avec un unique matériau pour satisfaire l’ensemble des besoins. La clé de la résilience réside ainsi dans la capacité à s’adapter aux changements dans un cycle de vie par anticipation via notamment des systèmes de pré-industrialisation, de modularité et de démontabilité. Au regard de ces contraintes, la créativité des concepteurs risque-t-elle d’être totalement bridée ? Depuis le 13 mars dernier, les maîtres d’ouvrage publics ou privés peuvent, pour la construction des bâtiments, déroger à une liste de normes et mettre en œuvre une solution d’effet équivalent. Rappelant les objectifs de la loi Essoc, la Fédé­ration nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF) a souligné l’évolution de l’approche et de l’analyse des préventionnistes. Quelle souplesse peut être accordée aux architectes en matière de protection incendie ? De l’étude du comportement humain lors des incen­dies au passage d’une logique réglementaire à une logique performancielle, sept pistes de réflexion sont d’ores et déjà engagées. Avec la passerelle du Mont-Saint Michel, du cabinet Dietmar Feichtinger Architectes, le bâtiment du Monde de l’agence Snøhetta et le centre commercial Cap 3000 à Nice, trois retours d’expérience ont témoigné de la capacité des architectes et des concepteurs à rester créatifs sous des contraintes particulièrement fortes.

LES INTERVENANTS

•  Les enjeux architecturaux de la ville résiliente
Qu’est-ce qu’une ville résiliente ? La stratégie de résilience de Paris
Sébastien Maire, Ville de Paris, délégué général à la Transition écologique et à la résilience
•  Loi Essoc1 et permis d’innover : conjuguer sécurité et liberté architecturale
Didier Rémy, responsable prévention du SDIS 162 et animateur de la commission Prévention de la FNSPF3
•  Résister aux agressions et aux nouveaux risques : quand la construction entre en résilience
Stéphane Herbin, directeur département Innovation et communication, CTICM4
Concilier résilience et architecture/Retours d’expérience
– La passerelle du Mont-Saint-Michel et le viaduc du Grand Paris
José Luis Fuentes, architecte, Dietmar Feichtinger Architectes
– Le siège du groupe Le Monde à Paris,
Frank Foray, architecte, Snøhetta
– Le centre commercial Cap 3000 à Nice
Mark Wilson, directeur exécutif, architecte associé Groupe-6

1Loi pour un État au service d’une société de confiance
2 Service départemental d’incendie et de secours de la Charente
3 Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France
4 Centre technique industriel de la construction métallique

Retrouvez l’intégralité de la conférence en vidéo sur youtube : https://www.youtube.com/watch?v=hdYsHfpIk-0&list=PLph62kbSqQjYhIU2Wk-xqwNSaslg_aksC
Prochain rendez-vous à la Maison de l’architecture en Île- de-France le 29 octobre 2019, à partir de 18 h 30 : « Tout change, tout évolue… sauf l’architecture ? Quand les villes du futur se construisent un avenir ».

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