PÔLE SIMONE-VEIL, LE HAVRE, FRANCE
Pôle en acier glacé

Non loin de la gare du Havre, le quartier Danton fait peau neuve. La prison a laissé place au pôle sportif et socio-culturel Simone-Veil auquel sa vêture en inox tantôt brossé, tantôt poli miroir, confère des allures d’immense iceberg pixellisé, tel un mirage dans un désert glacé !

PROJET URBAIN EN « DÉLIBÉRÉ »

Construite en 1860, l’ancienne prison ferma ses portes en 2010 avant d’être démolie deux ans plus tard. La Ville saisit alors l’opportunité pour requalifier le quartier Danton à la réputation quelque peu sulfureuse. À la suite d’une concertation citoyenne, près de la moitié du terrain fut affectée à la construction d’un complexe comprenant un plateau culturel – avec médiathèque, relais lecture, ateliers créatifs et numériques, espaces communs à partager – et un plateau omnisport complété par un mur d’escalade. Occupant l’ensemble de l’emprise en infrastructure, un parking public de 117 places a permis de libérer un vaste parvis oriental que devance un square, les deux s’étendant au nord en lieu et place du parc de stationnement préexistant. Équipement de quartier ouvert à ses habitants et usagers (proximité immédiate d’un collège, auberge de jeunesse à venir), le rez-de-chaussée concentre les espaces communs à partager.
Largement vitré sur le parvis et sur la rue Michelet, à l’arrière, ce socle se veut traversant. Le hall d’accueil peut être isolé du reste du niveau bas lors des manifestations et entraînements du vaste plateau sportif de 1 800 m2 (doté de 750 places en gradins dont un tiers télescopiques) implanté au premier étage que desservent deux escaliers latéraux (dont un en acier galvanisé). Se déployant sur toute la double hauteur (13 m) de la trame septentrionale, la structure artificielle d’escalade grise et orange est visible en fond de scène, des tribunes amovibles.

PARVENIR À L’ÉPURE

« Ce n’est pas tant le dépouillement d’un trait qui nous fascine que son épaisseur ou encore son évidence. Telles ces architectures pragmatiques, parfois industrielles ou militaires, souvent semi-vernaculaires, où il n’y a rien à ôter ni à ajouter pour ressentir la grâce de l’œuvre. » Dans cette quête d’émotion sans fard de Karine Herman et Jérôme Sigwalt, la matérialité constitue l’un des principaux enjeux de leurs projets. Ce programme de 4 400 m2 « puise sa genèse dans la morphologie archétypale des entrepôts en briques des docks voisins » à l’origine du paysage urbain havrais crénelé de toitures à deux pentes. Elle rend aussi hommage à la beauté simple de leurs grands volumes capables qu’ici les architectes projettent en suspension au-dessus du socle de béton et de verre. Deux immenses poutres acier triangulées autorisent le franchissement des frontons – dont un en porte-à-faux côté parvis – et le vitrage intégral de part et d’autre du plateau sportif. L’appareillage traditionnel de la brique locale a été, une fois verticalisé, transposé en une subtile alternance de feuilles d’inox (Aperam) – soit brossé (Ugiline), soit poli miroir (Ugibright) – et d’ajours afin de filtrer la lumière naturelle au soleil levant (parvis) et couchant (rue Michelet). Comme en écho à ces deux gigantesques vitraux contemporains, le faux-plafond bois à pans coupés suspendus se donne des allures de voûtes nervurées du gothique flamboyant !