LA TOUR SILEX² À LYON

Une greffe d’acier au secours du béton

Portée par Covivio, l’opération Silex² s’impose comme un authentique signal de la réinvention de La Part-Dieu. Constituée d’un ensemble immobilier de bureaux d’environ 31 000 m² de plancher et s’élevant jusqu’à près de 130 m, elle comprend la restructuration de la tour EDF existante, la réalisation d’une extension des plateaux accolée à celle-ci et surmontée d’une coiffe et d’un mât de 18 m, enfin, la construction d’un immeuble en R + 8 communiquant avec l’édifice IGH par un socle actif. Ajoutée à la façade nord de la tour, cette greffe, que seul l’acier peut réaliser, révèle le projet par la puissance de la structure de ses pignons et par sa silhouette effilée. 

Doc. : Asylum/MA Architects

Conçue dans les années 1970, au coeur du quartier de La Part-Dieu, la tour EDF témoigne de la virtuosité des architectes Jean Zumbrunnen, Charles Delfante et René Provost dans l’emploi du béton armé, une des caractéristiques les plus marquantes de l’architecture de La Part-Dieu. Défiant les lois de la gravitation, l’imposante tour est en effet posée en équilibre sur un pied étroit en « taille de guêpe » en béton brut, élément le plus remarquable de la construction. Mais comme la plupart des tours de bureaux de cette génération, la tour EDF n’est plus adaptée aux usages attendus pour de multiples raisons : plateaux trop petits, circulations protégées en périphérie du noyau empêchant la souplesse d’utilisation, accessibilité aux personnes handicapées, mise aux normes de sécurité incendie, performance thermique… Pas question pour autant, pour les architectes, de démolir l’ouvrage. Leur réflexion a donc porté sur les différentes solutions capables de revitaliser cette construction emblématique. Le principe : utiliser la surcapacité du noyau existant en termes de trafic d’ascenseur afin d’augmenter la surface des niveaux. Et c’est la greffe architecturale qui s’est imposée, laquelle offre un total de 1 000 m² par niveau et assure ainsi la viabilité de l’ouvrage. Cette extension composée d’une structure sans noyau est entièrement en acier. Contreventée par un exosquelette, elle imprimera désormais la nouvelle identité de Silex² : la première tour acier sans noyau béton depuis la tour Eiffel et aussi la tour la plus élancée sur le continent européen. La conception structurelle de ce nouvel ensemble répond à trois impératifs : la structure de la greffe est indépendante de la tour existante ; les plateaux sont larges, lumineux et libres de tous les éléments structurels ; le socle est actif et accessible au niveau de la rue pour assurer la liaison avec la ville. 

Défiant les lois de la gravitation, l’imposante tour est posée en équilibre sur un pied étroit en « taille de guêpe », en béton brut. ©DR

IDENTITÉS PROPRES EN DIALOGUE 

Hybride, l’objet intègre l’architecture de Zumbrunnen tout en la respectant et possède néanmoins une cohérence architecturale doublée d’une expression contemporaine. Mais la conception de cette construction neuve accolée à une tour existante située dans une zone à risque sismique soulève des problématiques complexes liées au comportement dynamique différencié de ces deux structures sous l’effet des séismes ou du vent. Les deux constructions doivent donc être structurellement indépendantes. Un couplage des deux structures est cependant prévu au dernier niveau de la tour déjà en place afin de limiter les déplacements différenciés. Des volumes techniques sont également prévus dans l’épaisseur de cette jonction pour intégrer les fluides nécessaires au fonctionnement de l’extension. Afin d’améliorer la réaction au séisme de la tour première, celle-ci est écrêtée de trois niveaux qui seront reconstruits en acier pour alléger le sommet. Son noyau est prolongé pour servir les deux niveaux supplémentaires de l’extension. Les proportions sont conservées ainsi que la structure des façades, qui sont ajourées à partir du niveau R + 23. Le volume de la tour initiale est donc allégé en partie haute pour créer un dialogue avec la greffe métallique et sa coiffe. Le résultat constitue un ensemble cohérent, où chaque élément a une identité propre et l’exprime à travers sa forme et son architecture. La tour existante, monolithique, avec son remarquable pied en béton désormais dégagé, vient ancrer l’histoire du bâtiment. La greffe architecturale, plus haute, est conçue comme un objet asymétrique surmonté d’une flèche qui tend vers le ciel. Son exosquelette métallique descend jusqu’au sol en encorbellement sur le socle qui, actif, relie la nouvelle tour à l’immeuble R + 3/R + 8 et les deux à la ville. De quoi dynamiser la skyline et conférer à l’objet une silhouette immédiatement identifiable ; la greffe, plus haute que l’existant, affirmant l’élancement acéré d’une flèche. 

Maîtrise d’ouvrage : Covivio
Architectes : MA Architects et Arte Charpentier Architectes
BET : Terrell
Constructeur métallique : SMB 

L’exosquelette métallique descend jusqu’au sol en encorbellement sur le socle qui, actif, relie la nouvelle tour à l’immeuble R + 3/R + 8 et les deux à la ville. ©DR
©DR
0