TOUR SILEX2 À LYON

Coup de cœur à la Part-Dieu

Particulièrement réussie, Silex2, l’extension-rénovation de l’ancienne tour EDF de Lyon la Part-Dieu, a de quoi surprendre puisqu’elle accole une tour siamoise à ossature acier sans noyau à l’IGH très seventies. Doit-on voir un début d’explication dans la dénomination de l’agence locale Má Architectes, associée à Arte Charpentier ? En japonais, má désigne l’intervalle spatial
ou temporel entre deux choses, aussi essentiel que les deux éléments qui le limitent !

Obsolescence architecturale et urbaine

Co-auteurs de l’urbanisme sur dalle programmé pour le quartier de la Part-Dieu, Jean Zumbrunnen et Charles Delfante s’associèrent à René Provost pour concevoir la tour EDF-GDF, livrée en 1977, à proximité de la gare, elle-même en superstructure et haute de 82 m. Le premier de ses 18 étages de bureaux démarrait à 17 m du trottoir, en encorbellement sur un massif piétement béton entouré de bâtiments provisoires couronnés par un grand escalier extérieur pour y accéder en attendant en vain l’arrivée de la dalle. Un quart de siècle plus tard, les conséquentes évolutions des espaces tertiaires et de la technologie digitale ainsi que le renforcement des réglementations environnementales, sécuritaires et d’accessibilité ont concouru à l’obsolescence prématurée de cette tour. Facilitée par le nouveau PLU, sa rénovation s’imposait. Restructurer et surélever ? Difficile car ses étages n’offraient que 450 m2 de plateaux de travail.
Démolition totale pour récupérer de la surface et construire du neuf ? Cela eut été plus que probable au début des années 2000, mais, considérant la tour comme élément architectural remarquable du style Part-Dieu, la Métropole de Lyon tenait à la conserver. Il ne restait alors à son nouveau propriétaire, Covivio (adossé à ACM), que l’option de la réhabiliter et de lui greffer une extension permettant de quasiment doubler sa surface pour atteindre 31 000 m2 !

Deux dans l’haut

Démarrées dès 2010, les études de faisabilité envisagèrent de multiples scénarios avec un socle plus ou moins volumineux, la création d’une barre ou d’une seconde tour reliée par une passerelle à la première, faisant osciller la superficie globale de 22 000 à 60 000 m2. Mais il importait aux concepteurs d’aboutir à une tour élancée, à l’architecture contemporaine. Le diagnostic de l’existant révélait une surcapacité structurelle et un noyau surdimensionné susceptible de desservir des plateaux de 1 000 m2, une fois optimisée sa circulation horizontale contrôlée. Dès lors devenait envisageable la construction d’une tour siamoise de 23 étages sans noyau dont l’exosquelette métallique – pour limiter son poids et faciliter sa mise en œuvre sur une emprise exiguë – permettait d’engendrer à chaque niveau un plateau de travail de 400 m2 (12 x 34 m) dépourvu de tout poteau. Un vaste socle (R + 2/3) – avec deux halls d’accueil, une salle de conférence de 200 places et patio – complété par un ERP (R + 8) occupe le reste de la parcelle.

Prouesses techniques

Entièrement mise à nu, désamiantée, la tour existante a vu ses trois derniers niveaux démolis pour être reconstruits en acier afin d’alléger les descentes de charges (19 150 t) et redonner de la capacité supplémentaire à ses fondations, les éléments de charpente préfabriqués de son extension devant être hissés grâce à une grue positionnée au sommet de son noyau central, surélevé pour desservir les niveaux supérieurs de l’extension, coiffe comprise accueillant les équipements techniques. « L’ossature devait résister au vent et à d’éventuels séismes, observe Antoine Durand de Má Architectes. Seul l’acier pouvait fournir la résilience nécessaire, mais le choix de ce matériau supposait de régler le problème de son comportement dynamique différencié par rapport à celui du béton. » Les deux structures sont donc indépendantes via un joint de dilatation « inter-tours » dont l’épaisseur a été portée, au cours des études, à 1,20 m pour constituer une bande technique intégrant l’ensemble des nouveaux réseaux de fluides. L’exosquelette comprend, en pignons, quatre grandes poutres Warren verticales (111 m de hauteur) et quatre autres en pied (1,10 m de largeur) lacées de diagonales en tubes carrés (40 cm de section) et, sur les longs pans, des portiques cadres, le tout réalisé en PRS, floquées (coupe-feu 2 h) puis capotées d’une tôle d’aluminium parachevant son aérienne élégance. Des profilés métalliques alvéolaires constituent les solives des planchers mixtes béton/acier. Les deux tours ne sont couplées qu’au niveau 21 via deux points d’attaches (bêches et goujons) dans chaque direction. Le porte-à-faux de 9 m des huit niveaux de l’ERP ainsi que sa toiture sont en charpente acier. Que l’on soit piéton, utilisateur ou visiteur, l’effet est saisissant !

• Maître d’ouvrage : Covivio
• Architectes : Má Architectes et Arte Charpentier (conception), Builders & Partners (MOE)
• BET structures : Terrell Group
• Entreprise générale : Eiffage
• Constructeur métallique : SMB